À la tête d’un « mini empire du biscuit » implanté notamment à Stosswihr, Buhl, voire Cernay avant sa liquidation judiciaire, un chef d’entreprise a été condamné pour fraude fiscale, hier par le tribunal de Colmar.
Continental Biscuits (CB), |
L’affaire examinée le 2 avril dernier par le tribunal de Colmar concernait l’industriel Didier Chervin (47 ans), établi pendant des années à Stosswihr, dans la vallée de Munster. Alors à la tête d’une holding familiale regroupant une quinzaine de sociétés, employant plus de 700 personnes en Europe, il habite aujourd’hui en Haute-Normandie et se trouve en faillite personnelle.
Mais c’est pour fraude fiscale en 2008 et 2009 qu’il a comparu voilà quinze jours, en tant que dirigeant d’entreprises alsaciennes spécialisées dans les biscuits fourrés : Continental Biscuits (CB), située à Buhl, et Mondial Biscuits (MB), basée juridiquement à Stosswihr puisqu’une unité de production, prévue à Cernay, n’a finalement jamais rien produit.
« Où est le mobile ? »
Didier Chervin a contesté l’ensemble des faits reprochés, c’est-à-dire trois opérations relatives au paiement de la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) au « fisc », la direction générale des finances publiques (DGFiP).
Didier Chervin |
Pour comprendre, il faut savoir que Mondial Biscuits avait commandé un four industriel à la filiale française d’une société allemande (d’où une déduction de 360 000 € de TVA), mais ce four n’étant finalement jamais livré, MB s’était tourné vers la maison-mère outre-Rhin pour commander à nouveau cet outil de production de 70 mètres de long. Qu’est devenue la première commande ? « Je soutiens qu’elle a été résiliée, comme en témoi-gne un accord de compensation ; la TVA déduite pour cette première commande aurait donc dû être reversée à la fin de l’année 2007 » , a indiqué le procureur de Colmar, Bernard Lebeau.
Ce n’était pas l’avis de Me Renaud Bettcher, l’avocat de la défense, qui a fait le parallèle avec l’achat d’une voiture allemande : « Il est naturel de se tourner vers le concessionnaire du coin avant de contacter le siège allemand en cas de problème ! Qu’est-ce que cette histoire de résiliation de contrat ? Où est le mobile du crime ? » , ironise-t-il, puisque la fraude fiscale est en fait un délit.
617 000 € à verser au fisc
Le deuxième épisode fait suite à un violent incendie à l’usine Continental Biscuits (CB) de Buhl, en mai 2008. Pour permettre à ce véritable « moteur » du groupe de tourner, MB a alors revendu en septembre 2008 le fameux four – enfin livré – à sa « société-soeur » CB. « Mais la deuxième commande du four ayant été financée via un crédit-bail, MB n’était pas propriétaire mais locataire de cet outil, donc CB ne pouvait pas déduire à son tour les 360 000 € de TVA ! » , a pointé le procureur.
Et le représentant du parquet d’expliquer la troisième et dernière opération reprochée : « En octobre 2009, à quelques mois de sa liquidation judiciaire, pour ne pas qu’un créancier se serve, en particulier la société allemande qui avait fourni le four, la biscuiterie CB de Buhl a cédé des actifs à la holding familiale. Une vente fictive, du moins pour CB qui n’a pas déclaré la TVA collectée devant être reversée à l’État, alors que la holding a déduit quelque 600 000 € de TVA, une demande finalement rejetée par le fisc. » Un an de prison dont la moitié ferme ont été requis. « Mais de quoi accuse-t-on cet homme, d’autant que toute la TVA avait été déclarée lors de la vente à CB, selon le commissaire aux comptes ? Enfin, on nous laisse croire qu’il y avait un deuxième four fictif » , a plaidé Me Bettcher.
Dans son délibéré rendu hier, le tribunal correctionnel de Colmar a prononcé une relaxe pour les faits reprochés en 2008, c’est-à-dire pour les deux premières opérations. Mais pour soustraction frauduleuse du paiement de l’impôt fin 2009, lors de la cession d’actifs à la holding, la juridiction a fixé la peine à 10 000 € d’amende dont la moitié avec sursis. Par ailleurs, Didier Chervin et la société Continental Biscuits devront verser solidairement 617 000 € dûs au fisc.
( Source L'Alsace )
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